Chine et Tibet, les trois épées

Publié le par dibo

Cette histoire constitue le chapitre 30 du Zhuang Zi, je l'ai raccouci pour en faciliter la lecture. C'est surtout la seconde partie, la description des épées, qui est intéressante. Elle constitue en quelque sorte mon point de vue sur les événenements au Tibet. Pour un avis plus factuel, je vous renvois à cet excellent article de Pierre Haski.

Le roi Wen s'était pris de passion par les combats d'épée. Il entretenait à sa cour plus de 3000 mercenaires de tous les royaumes, leur demandant en échange de se battre pour son bon plaisir. Celà dura trois ans, chaque années les tués et les blessés se comptaient par centaines, sans que le roi s'en émeuve. Et, pendant ce temps, il négligeait le gouvernement à un tel point que les royaumes voisins s'entendirent pour préparer une invasion. Le prince héritier l'apprit et il promit mille pièces d'or à quiconque pourrait persuader le roi de renoncer à ses combats.
Quelqu'un lui recommanda Zhuang Zi. Aussitot, un courrier lui fut envoyé avec une invitation à la cour et de riches cadeaux. Zhuang Zi refusa les cadeaux mais accepta l'invitation. Vexé, le prince ne voulu rien lui dire, mais Zhuang Zi lui expliqua :
- Je crois savoir que vous voulez que je guérisse le roi d'une passion malsaine. Si je le vexe, il me tuera, si j'échoue, vous me tuerez, dans les deux cas vos présents me seraient inutiles. Mais si je peux plaire au roi et vous satifaire, alors ils sont bien insuffisants. Voilà pourquoi je les ai refusé.
- Vous avez raison, dit le prince, le roi ne s'intéresse plus qu'à ses mercenaires.
- Ce n'est pas un problème, je suis moi-même très habile à l'épée. Faites-moi faire un costume et amenez moi à votre père.
Zhuang Zi fut donc présenté au roi qui le reçut l'épée à la main. Le roi lui demanda s'il savait se battre, Zhuang Zi répondit :
- Placez n'importe lesquels de vos protégés tous les dix pas sur d'une frontière à l'autre, pas un ne me survivra !
Le roi fit savoir qu'il allait choisir les meilleurs de ses mercenaires pour se battre contre Zhuang Zi. Pendant sept jours, ce fut une grande hécatombe, chacun voulant démontrer sa force. Au septième jour le roi sélectionna les six plus habiles et il les mit au garde à vous dans une grande salle, puis il fit appeler Zhuang Zi et lui dit :
- Quelle arme souhaitez vous utiliser ?
- Toutes me vont. Mais j'ai trois favorites, j'utiliserai celle que vous préfererez.
- Très bien ! Quelles sont ces armes ?
- Ce sont l'épée de l'empereur, l'épée du seigneur et l'épée du vulgaire.
- Qu'est-ce que l'épée de l'empereur ?
- C'est celle qui atteint tout ce qui se trouve à l'intérieur des frontières, celle qui frappe les barbares et les bandits, celle qui règne sur les montagnes et sur les mers. Elle respecte l'ordre des choses, elle est juste et clémente, ainsi lorsqu'elle est brandie, rien ne résiste, tous se soumettent. Voilà ce qu'est l'épée de l'empereur.
- Qu'est-ce que l'épée du seigneur ? Demanda le roi surpris.
- C'est l'arme du courage et de la bravoure, de la fidélité, de la loyauté et de la sagesse. Observant les lois du ciels, de la terre et des temps, elle sauvegarde la paix et l'harmonie dans les provinces. Crainte et respectée, elle prévient la rebellion. Voilà ce qu'est l'épée du seigneur.
- Et qu'est-ce que l'épée du vulgaire ?
- C'est celle que l'on trouve dans les mains de vos soudards. Celle qui tranche les gorges, celle qui déchire les entrailles, celle des bandits et des hommes dont le destin et de s'entretuer. Ô Roi ! Vous pourriez être le maitre de l'empire ! Pourquoi vous abaisser à l'épée du vulgaire ?
Le roi compris, il emmena Zhuang Zi dans la salle du banquet puis s'enferma pendant plusieurs mois pour réfléchir à sa conduite. Pendant ce  temps, les mercenaires se continuèrent à s'entretuer, si bien bien qu'il n'en resta aucun.

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S
Pour l'épée de l'Empereur, reste à définir ce qui est Juste et Clément...
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